En seulement quelques années, Chloë Collin, alias La Saint Glinglin, est passée des vidéos de vulgarisation sur le travail de commissaire-priseure à cheffe d’entreprise, toujours animée par le même désir : dépoussiérer l’image d’un métier vieux comme le monde. Rencontre.
La Saint Glinglin. Un drôle de nom pour un drôle de personnage. À mille lieues du cliché du commissaire-priseur sexagénaire, costard sur le dos et moustache sous le nez, Chloë Collin, de son vrai nom, dynamise le secteur depuis l’obtention de son titre de maître en 2020. Sur les réseaux sociaux, où la jeune femme a longtemps multiplié les vidéos de vulgarisation autour d’un métier encore (trop) perçu comme élitiste, mais aussi en salle des ventes — chez Fauve Paris, Pierre Bergé et, depuis peu, chez Saint Auction, sa propre maison.
“Je faisais des vidéos car je voulais vraiment démocratiser l’univers des ventes aux enchères. Mais je ne suis pas une influenceuse”, nous rappelle-t-elle. “Ouvrir ma propre maison, c’est une évolution naturelle des choses. Je continue toujours d’essayer d’innover dans ma manière de faire des ventes aux enchères. Je le fais juste différemment. J’ai créé mon entreprise parce que j’avais envie d’être libre, de raconter l’histoire que je voulais. Et j’ai l’impression que notre génération a envie de travailler pour elle, pour que ça ait du sens. Mais c’est aussi une question de personnalité.”
Casser les codes
Et de la personnalité, Chloë, ça, elle en a. “Je suis quelqu’un de très artistique, de libre, et qui a besoin d’exprimer sa créativité. Du coup, je m’épanouis totalement en pouvant donner vie à ma propre vision”, nous confie-t-elle. Arrivée comme une pétillante tornade dans un milieu bien codifié, cette surdouée du marteau a poussé tout un secteur à revoir sa communication, et surtout son problème de démocratisation. Faisant le pont entre un métier de tradition et une nouvelle génération pleine de ressources, Chloë Collin croit en la jeunesse comme elle croit en son taf.
Alors, pour tenter de faire cohabiter les deux, la Parisienne de 29 ans mise sur des codes empruntés ailleurs — au monde du cinéma et de la mode notamment. “Je continue de faire des vidéos, mais pour promouvoir les ventes. À chaque annonce d’une nouvelle vente, j’imagine une direction artistique particulière, afin qu’elle soit plus immersive et attractive.”
Conteuse d’histoires
Une volonté qui s’exprime non seulement dans les mini-films annonçant les ventes, mais également le jour J, où la commissaire-priseure s’écrie “Adjugé !” aussi bien pour des œuvres d’art que pour des pièces d’archives de grandes maisons.
“Il y a de plus en plus de vêtements dans les ventes”, nous explique-t-elle. “Récemment, toute la collection Margiela s’est vendue aux enchères pour plus de 1,8 million d’euros.”
Eh oui : si la seconde main a le vent en poupe, les salles des ventes, elles, regorgent de trésors que les jeunes acheteurs peinent encore à découvrir.
“Malheureusement, les jeunes ne vont pas encore dans ces enchères. On pourrait le croire, mais non”, se désole-t-elle. “J’aimerais vraiment qu’ils aient ce réflexe comme ils ont celui du Bon Coin ou de Selency. Surtout qu’on y fait parfois de meilleures affaires ! C’est vraiment quelque chose que je veux montrer : qu’aujourd’hui, tu peux collectionner à tous les prix. Mais il y a un blocage, c’est encore trop considéré comme quelque chose de guindé. Alors que non !”
Il n’y a qu’à regarder notre interlocutrice : bijoux fantaisie aussi clinquants que son sourire. Effectivement, Chloë n’a rien de guindé, ni de vieillot. Et si elle tient aussi fort à faire venir un nouveau public dans les ventes aux enchères, c’est parce qu’elle désire plus que tout partager avec eux toutes les petites histoires qui entourent ces objets.
Passionnée avant tout, Maître Collin le rappelle : “J’exerce un métier qui touche, qui fait des ponts entre tous les arts. Le cinéma, la mode, l’art de vivre, les arts décoratifs… Ce n’est pas juste un métier mercantile. Certes, on vend, mais on raconte avant tout des histoires. Parfois de famille, parfois personnelles, parfois anecdotiques. On raconte l’histoire de l’art ou même l’Histoire, avec un grand H. Et quand on vient en salle des ventes, on n’achète pas seulement un petit objet cool, on achète un bout de cette histoire.”
Et pour connaître la prochaine, il ne faudra pas attendre la Saint Glinglin, mais le mois de juin prochain !