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New Look n°169 du 01/10/1997 "Le dossier sexplosif". Crédit : Auteur et Editeur : NEW LOOK

Histoire de la sextape, de Pam à la voisine de palier

Par Yemcel Sadou

Avec la sortie de la série Pam and Tommy, la sextape fait à nouveau sensation. L’occasion de revenir sur ce qui se cache derrière ces vidéos qui cassent l’image très lisse des stars d’Hollywood et sur la manière dont elles se sont imposées dans les foyers français.

Si elle n’est pas la première sextape de l’histoire, comme elle est souvent présentée, la vidéo hot de Pamela Anderson et Tommy Lee qui a fait scandale dans les années 90 reste sans conteste la plus connue, annonciatrice d’une longue lignée. Les films présentant les ébats de stars se sont multipliés depuis le buzz mondial autour de la vidéo de Pam et Tommy. Paris Hilton, Colin Farrell ou encore Kim Kardashian, on ne compte plus les célébrités qui ont décidé de laisser un troisième œil capturer leurs moments intimes. De quoi briser l’image idéalisée du show-business pour découvrir un envers du décor bien plus sulfureux.

Pamela Anderson et Tommy Lee, les icônes du genre

Après la sortie inopinée de leur sextape, les images de la star d’Alerte à Malibu et du batteur du groupe de hard rock Mötley Crüe en ont pris un coup. Surtout Pamela qui a subi un déferlement de remarques sexistes. Avril 1996 : « Madame Anderson Lee, vous rappelez-vous quel âge vous aviez la première fois que vous avez exposé publiquement vos organes génitaux ? » interroge un avocat dans la série Pam and Tommy. Il martèle : « Vous ne considérez pas que poser nue devant une caméra soit un acte sexuel ? »

Quand la sextape de Pamela et Tommy a été volée et diffusée en 1996, l’opinion publique a jugé le couple comme étant le premier responsable. Il a d’abord été accusé de l’avoir fait fuiter volontairement. Mais surtout d’avoir voulu entretenir une image sulfureuse. C’est pourquoi les médias et les juges ont tenté de culpabiliser Pamela Anderson, qui avait déjà une image sexualisée après avoir posé nue pour Playboy.

Véritable acte de « violation de la vie privée », cette sextape a aussi bousculé les mœurs. Chacun s’est transformé en voyeur obscène, curieux de s’immiscer dans l’intimité de deux superstars des tabloïds. Le grand public dépassait le stade des simples photos de paparazzis : c’était un regard bien plus intrusif porté sur l’intimité de ce couple iconique. 

D’autant que les deux « acteurs » de cette sextape ne savaient pas que cette vidéo serait diffusée. Sur les 54 minutes de film, seulement 8 contiennent des scènes de sexe. L’animateur de radio et télé américain Howard Stern déclarait fin 1997 : « Ce qui est cool avec cette vidéo, c’est que vous pouvez vivre leur vie avec eux. ». Et c’est précisément ce que la sextape a révolutionné dans le monde du X. Pas des scènes jouées mais des vrais moments de vie. 

Une rampe de lancement pour devenir célèbre

La sextape peut lancer des carrières. Mais cela se fait sur du bad buzz. La sextape de Paris Hilton en 2004 a institué  le statut de it-girl  de la jeune héritière, et cassé son image de fille à papa. Même si cette vidéo diffusée sans son consentement par son copain de l’époque a été un tremplin pour sa carrière, elle a écorné sa réputation. Réduite à cette culture du buzz qui s’est développée depuis les années 2000, la starlette a longtemps représenté le « prêt à tout pour être connu ». 

Aujourd’hui la sextape a perdu son côté sulfureux. Car, après tout, ce n’est qu’une vidéo d’ébats sexuels. Rien de si impressionnant. A-t-on vraiment attendu après toutes ces stars pour faire des sextapes ? Si de nos jours ce type de vidéo est aussi banalisé, c’est parce que les technologies et les mœurs ont changé. La sextape est désormais accessible à tout le monde. De nombreux couples veulent immortaliser leurs moments d’intimité en vidéo, qu’ils garderont comme un souvenir. Rien de différent de la sextape de Pamela Anderson et Tommy Lee. Sauf que là il s’agit d’anonymes et que les enjeux ne sont pas les mêmes. Rob Lowe a ainsi payé les frais pour sa sextape de 1988, considérée comme la première du genre. Elle a ruiné sa carrière d’acteur, l’entraînant dans un désert professionnel. 

Là où la pornographie est rattachée à une narrativité, la sextape veut capturer des moments charnels qui se veulent vrais, spontanés. Mais la représentation de la sexualité sous toutes ses formes est souvent le miroir d’une société. Le miroir de ses normes et de ses mœurs, qui définissent la sexualité d’une époque. 

Un Français sur dix dit avoir déjà réalisé une sextape. Le phénomène d’une génération qui espère garder un souvenir d’un moment passé en intimité avec quelqu’un. Comme une photo de vacances ou d’anniversaire. Une sexualité souvent débridée du fait de l’omniprésence du porno qui entraîne un mimétisme : un homme sur deux essaie de reproduire les positions des films pornographiques. Alors simple souvenir ou ego trip ? Peut-être un peu des deux. 

La sextape aujourd’hui à la portée de tous

Aujourd’hui et depuis les années 80 avec le développement du sexe amateur, les moyens techniques ont évolué. Plus besoin d’avoir un plateau de tournage avec un réalisateur, des lumières ou une caméra professionnelle. Les moyens de filmer en indépendant ont changé la donne. Avec le caméscope, cette petite caméra portative qui permet d’enregistrer des images et du son sur un même support, filmer est devenu accessible à tous. D’abord avec des caméscopes analogiques comme le célèbre Sony Betamax commercialisé en 1983 et, vers la fin des années 90, les appareils numériques avec l’arrivée du DVD. Avec l’explosion du numérique dans les années 2000, les caméscopes sont rapidement devenus grand public, de quoi se prendre un réalisateur professionnel. 

La sextape est née et a évolué avec la technologie. Avec l’émergence d’Internet, ces contenus se sont répandus sur les premiers sites web. Aujourd’hui ces vidéos intimes sont tournées par des amateurs sur des smartphones. Le porno a fait sa révolution pour laisser place à une image sexualisée toujours plus numérisée. 

Car la sextape de Pamela Anderson et Tommy Lee a permis de briser certaines barrières. Aujourd’hui 90 % des hommes de moins de 25 ans ont déjà regardé un site porno. Une génération biberonnée dès son adolescence aux sextapes des célébrités. Autrefois réservée aux icônes d’Hollywood, la sextape est devenue un phénomène de société. Plus rien n’empêche la boulangère du coin de la rue ou le médecin du quartier de s’adonner à la même pratique.