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Illustration, DAVID ADRIEN

ODE DE VIE

Par LAURÈNE PETIT — Illustration, DAVID ADRIEN

Tels des alchimistes du terroir, ils battent la campagne avec leurs alambics d’un autre âge et leur savoir-faire ancestral. Distillant tantôt des pommes des vergers normands, des prunes d’Alsace ou du marc de raisin de la côte de Beaune et naviguant à vue dans les vapeurs de l’administration française : ce sont les derniers bouilleurs ambulants.


Si chaque village avait autrefois le sien, ils ne seraient plus que 600 à 700 en France aujourd’hui, selon le Syndicat national des bouilleurs ambulants. Ces artisans itinérants traversent les régions de France pour transformer les fruits locaux en eaux-de-vie. Gnôle, casse-gueule, Schnaps, eau ardente, goutte, digeo, tord-boyaux, casse-pattes : les noms ne manquent pas pour désigner ces eaux populaires dès l’Antiquité et que l’on croyait bonnes à tout guérir au Moyen Âge. Avec les déclins de la consommation des eaux-de-vie et l’imbroglio administratif de ces dernières années, il était de plus en plus difficile aux bouilleurs ambulants de tirer leur épingle du jeu.

EXONÉRATION FISCALE

Avec l’évolution de la législation depuis le 1er janvier 2024, cette pratique a gagné une nouvelle impulsion. Désormais, chaque propriétaire de vergers peut faire distiller jusqu’à 100 litres d’alcool à 50 degrés sans être assujetti aux droits d’accises. Cette exonération fiscale rend l’art de la distillation accessible et encourage à transformer les surplus agricoles en élixirs précieux, une tradition qui était autrefois pratique courante dans les campagnes françaises. “Le statut de distillateur ambulant est une spécificité française, je crois que ça n’existe pas ailleurs”, déclare Mathieu Sabbagh, fondateur de la distillerie Sab’s et dernier bouilleur ambulant de Bourgogne.

*Cet article est issu de notre numéro d’Hiver 2024-2025. Pour ne manquer aucun numéro, vous pouvez également vous abonner.*