Créateur oublié d’un numéro qui a subjugué le monde entier, il tenait sa troupe de danseuses dans une paire de gants.
Il y a un quinzaine d’années, chez un libraire parisien, le créateur visuel Olivier Kuntzel est tombé sur un bien étrange lot de photographies. Elles montraient un homme replet d’apparence débonnaire, au crâne dégarni et à grosses lunettes d’écaille, qui avait orné le majeur et l’annulaire de sa main souple et agile de minuscules tenues froufroutantes.
Ses doigts galbés comme des petites jambes de danseuses et dont les poils laissaient échapper un charme malaisant avaient de quoi intriguer le chasseur de trésors fantastiques. Telle la main envoûtée qui se libère du corps. Il s’agissait en fait du press-book de Georges-André Martin, cet artiste qui avait exhibé ses doigts dansants dans les cabarets parisiens avant de conquérir les scènes du monde entier, de Londres à New York, d’Oslo à Montréal. Un numéro unique en son genre dans l’histoire du music-hall que les encarts publicitaires des pages spectacles présentaient comme “ la plus grande attraction mondiale ”. L’acteur américain Harold Lloyd affirmera que même le grand Chaplin allant au rendez-vous d’amour. Ce travail de danses digitales consiste en la position fixe de trois doigts tandis que les deux autres remuent sans arrêt pour une biguine, un fox ou un tango. Il m’a fallu sept ans de travail pour réaliser ce numéro international. ”
Il sera engagé pour quinze jours à l’Alhambra de Londres. Ainsi, une archive de British Pathé intitulée “Finger Dancing! ” et réalisée au restaurant londonien Trocadéro (visible sur Internet) montre ses doigts descendant un mini-escalier et offrir un stupéfiant numéro de claquettes. Il enchaînera par une tournée d’un an en Amérique, à New York, Chicago, Détroit, Philadelphie et Montréal. Georges-André ne voyage pas seul, mais avec une troupe qui tient dans une paire de gants !
*Cet article est issu de notre numéro d’Hiver 2024-2025. Pour ne manquer aucun numéro, vous pouvez également vous abonner.*