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LES COLOSSES DU POTAGER

Par COLINE CHAPTAL

Alors que certains jardiniers s’amusent à croiser leurs plants pour améliorer leur rendement, Bruce Eesly plante des graines digitales. À l’aide de l’IA, il crée des OGM numériques laissant planer le doute  sur la véracité de ses clichés photographiques.

Qui a dit qu’être un artiste engagé signifiait prendre des images documentaires sombres et fatalistes ? Certainement pas Bruce Eesly, artiste et jardinier basé à Berlin. Présenté cet été aux Rencontres de la photographie d’Arles, son travail pastiche – une fausse série de photographies documentaires diffusée dans un pamphlet théoriquement publié en 1964 par l’industrie agroalimentaire – est aussi absurde qu’étourdissant. Il s’inscrit dans une tendance artistique où l’artiste n’est pas un simple fabricant de beau, mais bien un véritable porte-parole des sujets qui animent la société. Par son art, Bruce Eesly prône un engagement profond puisque son discours dépasse le cadre de ses images et va même jusqu’à soutenir de nombreuses associations favorisant la culture et la préservation des variétés rares et patrimoniales de semences. La frontière entre le jardin potager et le musée n’a donc jamais été aussi fine.

COURGES NUMÉRIQUEMENT MODIFIÉES

À l’image des OGM, organismes génétiquement modifiés, fleurissent désormais ce que l’on pourrait nommer des INM, des images numériquement modifiées dont il est parfois difficile de déceler les subtilités face à un procédé photographique classique. Bruce Eesly va même plus loin avec ces images intégralement créées numériquement pour Le fermier du futur, un projet qui sort tout droit de son imagination.

 *Cet article est issu de notre numéro d’Automne 2024. Pour ne manquer aucun numéro, vous pouvez également vous abonner.*