×
Broche Orphée, de Gabriel Falguières, vers 1900, or, diamants, calcédoine et perles

DIVINS JOYAUX

Par CHRISTOPHE VACHAUDEZ

Grâce aux bijoux, Kazumi Arikawa a trouvé la voie vers la pureté de l’âme, chère aux adeptes du bouddhisme. La preuve par son immense collection, qui fait l’objet d’un ouvrage divin.


Le titre de l’ouvrage paru chez Flammarion Divins Joyaux reflète cette quête suprême. Personnage atypique s’il en est, cet idéaliste japonais a réuni l’un des plus importants ensembles de bijoux au monde. Certains ont intégré sa collection. D’autres ont rejoint les musées ou les coffres d’amateurs privilégiés. Mais chaque pièce a été choisie avec soin et correspond à un échange subliminal entre le bijou et Kazumi Arikawa, qui agit au coup de cœur, sensible à l’histoire, au courant stylistique, au symbolisme et au pouvoir d’attraction d’une pièce, qu’il s’agisse d’un artefact préhistorique, d’une intaille antique ou d’un joyau issu d’un écrin royal. Et si l’aspect financier ne peut être ignoré, il est loin d’être prioritaire. 

Pour le moins singulière, cette démarche fait toute la différence. Elle découle d’un cheminement personnel, d’une expérience de vie. Très tôt, il découvre cet univers unique sans mesurer l’impact qu’il aura sur sa vie future. En effet, sa mère possède une boutique et fait commerce de bijoux. Kazumi s’y intéresse, observe et apprécie avec ses yeux d’adolescent. L’interaction existe déjà mais il faudra attendre pour que l’étincelle ne déclenche cette inclination presque mystique. 

Son penchant vers la spiritualité l’oriente d’ailleurs vers le monachisme. Pourtant, au bout d’un an, il aspire à autre chose et une visite au Victoria & Albert Museum ranime cette flamme pour le bijou. Deux rencontres vont encourager Kazumi à emprunter sans réserve le chemin qui s’offre à lui. À Londres, on lui conseille d’entrer en contact avec Diana Scarisbrick, historienne du bijou de renommée mondiale. Heureuse de faire profiter autrui de sa sensibilité et de ses connaissances encyclopédiques, elle aiguille ce collectionneur en herbe avec humour et patience. Kazumi achète bientôt son premier diadème. Il est signé Fabergé : peut-on rêver d’un début plus prometteur ? Intrigué par la signification des bijoux portés par les bodhisattvas, il n’hésite pas à interroger le Dalaï-lama qui lui explique que ces formes de -bouddhas parés de somptueux joyaux ont pour but de sauver les êtres sensibles. Ils sont envoyés du vrai monde, chargés de beauté, pour tous nous sauver. Voilà le véritable rôle des bijoux. Comment ne pas adopter sans réserve cette définition qui soudain donne tout son sens à sa quête. Kazumi voit désormais le bijou comme une prière. Miroir des entrailles de la Terre, les pierres précieuses dont ils sont sertis participent aussi à cet éveil de l’esprit qui conduit à la sagesse. 

*Cet article est issu de notre numéro d’Hiver 2024-2025. Pour ne manquer aucun numéro, vous pouvez également vous abonner.*