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Kate Moss au défilé John Galliano, collection prêt-à-porter, printemps/été 1994, Paris

À TIRE D’AILE

Par LAURENT DOMBROWICZ

Archanges et chérubins : top-modèles en apesanteur.

Il fut un temps où les défilés de mode étaient avant tout l’écrin pour le talent du créateur ou du couturier concerné, mettant en scène son individualité et sa singularité dans un dispositif ad hoc. Avec ou sans thématique – le fameux storytelling de la gen Z ! –, ces défilés avaient pour mission essentielle de séduire les professionnels présents dans la salle, soit l’exact inverse des shows d’aujourd’hui qui se consomment sur (très) petit écran par les profanes du monde entier. Autres différences de taille, l’enjeu n’était ni de remplir toutes les cases cochées par le département marketing et encore moins d’aligner un premier rang de célébrités plus ou moins éphémères. À chaque époque ses priorités et son système de valeurs. Si quelques-uns comme John Galliano, Alessandro Michele ou Viktor & Rolf ont su préserver ces moments suspendus que sont les défilés, cette espèce de conteurs de luxe est en voie drastique de raréfaction.

Il faut donc remonter aux décennies 1980, 1990, 2000 pour croiser sur les podiums des créatures ailées, prêtes à rejoindre le(ur) paradis. Et donc le nôtre. Le regretté Thierry Mugler, homme de spectacle devant l’Éternel, n’a jamais lésiné sur la dimension irréelle de ses créations et de celles qui les portent. C’est bien parce qu’il entendait re- dessiner la réalité et les corps humains qu’il a choisi ce métier après une brève carrière de danseur. Donc pas vraiment un hasard de croiser des anges et autres créatures célestes dans le spectacle total qu’il organise au Zénith de la Villette le 23 mars 1984. Une véritable première dans l’histoire de la mode car, au-delà de sa démesure stylistique, il s’agit aussi du tout premier défilé payant.

*Cet article est issu de notre numéro de printemps 2025. Pour ne manquer aucun numéro, vous pouvez également vous abonner.*