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Illustration PAUL LANNES

LE VENTRE DE PANTRUCHE

Par ÉMILIE LAYSTARY — Illustration par PAUL LANNES

De quoi la cuisine parisienne est-elle le nom ? Du jambon-beurre aux oeufs mimosa, elle offre un panorama bien difficile à embrasser.

La choucroute en Alsace, la bouillabaisse en Provence, la potée auvergnate… S’il est chose commune de pouvoir citer, en France, un plat phare par région, l’exercice semble plus ardu quand il s’agit de l’Île-de-France. Les spécialités culinaires liées à Paris sont légion mais c’est à un problème de définition que l’esprit logique se heurte. En effet, comment désigner le “purement parisien” quand tout ce qui émane de la capitale a fini par devenir “typiquement français” ?

Une soupe versatile

Prenons le croissant au beurre et la baguette, que les touristes du monde entier associent à la carte postale parisienne. Soit, mais ce serait oublier que ces préparations boulangères sortent chaque jour des fournils des quatre coins du pays. Et le croque-monsieur, qui aurait fait sa première apparition en 1910 au menu d’un café parisien, boulevard des Capucines ? On en mange désormais sur tous les zincs de France et de Navarre. Quid alors des champignons de Paris, dont la dénomination semble porter la trace de la provenance ? Trop facile ! Originaire d’Égypte ou de Chine, ce champignon longtemps associé aux carrières et aux Halles de Paris est désormais cultivé dans tout le pays — et même 70 autres, à travers le monde.
Ainsi, le casse-tête qui se pose est le suivant : si Paris a autant influencé le reste de la France, qu’est-ce qui, dans ce contexte, peut encore se targuer d’être exclusivement parisien ? L’incessant synec doque consistant à prendre Paris pour la France (et inversement) ne simplifie en rien notre affaire. Pars pro toto veut la locution latine — on nomme la partie pour signifier le tout. Les macarons le coq au vin, les oeufs mimosa… Et voilà comment les têtes de gondole de la gastronomie française et les entremets de brasserie de la capitale se mêlent et s’emmêlent.
Le goût de France se savoure à Paris pendant que le goût de Paris est la promesse d’une essence de France. Ce phénomène s’observe-t-il à propos de n’importe quelle capitale et son pays ?

*Cet article est issu de notre numéro d’Été 2024. Pour ne manquer aucun numéro, vous pouvez également vous abonner.*