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© Fendi

MILANO AL TRANCIO

Par Laurent Dombrowicz

FENDI

Silvia Venturini Fendi ne donne pas de contexte géographique à sa collection même si les touches semblent indiquer l’Ouest. Celui des grands espaces où on chevauche jusqu’au soleil couchant -d’où le superbe orange qui ponctue la collection-, du sud californien jusqu’aux plaines d’Argentine. D’humeur gaucho donc (mais absolument pas insoumis), son héros trimbale donc tout l’attirail du solitaire bohème, de la couverture au jean effiloché, version grand luxe comme il se doit. Sidérante de précision, cette collection montre une fois de plus l’équilibre parfait entre la fonctionnalité et l’ornementation, l’essentiel et le futile qui sont aussi nécessaires l’un que l’autre.

VERSACE

« Go home » semble crier cette collection où les objets de la ligne maison viennent appuyer la joyeuse hystérie du prêt-à-porter masculin. Si pendant des décennies, cette proposition s’est appuyée exclusivement sur l’iconographie des années Gianni Versace/Richard Avedon, c’est bien l’humeur (et l’humour) de Donatella qui triomphe aujourd’hui, boostée par l’incroyable succès de Fendace. Une ligne plus souple avec une aisance plus sportive, des pièces inattendues (un manteau en feuille de latex perforé jaune paille), une pléthore d’accessoires et une revisite audacieuse de certains imprimés iconiques font de cet opus un véritable shot vitaminé. Queer et maximaliste, cela va sans dire.

JORDAN LUCA

Nouveau venu dans le calendrier milanais, ce duo venu de Londres s’oppose à la tradition locale qui préfère des vêtements bien faits à une mode bien pensée. Rafraîchissante donc (on en avait bien besoin), cette réflexion stylistique sur la pulsion de mort, plus macabre que réellement morbide. Eros Thanatos en pleine action avec un évident sous texte sexuel, sans que l’on ait pour autant besoin d’une démonstration en slip sur le podium. L’énergie de Jordan Luca puise autant dans la littérature que la scène musicale punk, car le rock c’est définitivement has been, qu’on se le tienne pour dit !

PRADA

Le bruit des bottes (de cowboy) dans une maison de poupée, ainsi pourrait-on résumer cette collection radicale qui joue sur les déplacements de contexte dans l’appréhension d’une garde-robe masculine. On reconnaît bien évidemment les tocs de Raf Simons dans l’uniforme noir et ultra slim des premières (et dernières) silhouettes du défilé ainsi que dans les citations mapplethorpienne du short en cuir noir transformé ici en lederhosen. Précis et parfaitement efficace. Mais sans doute moins novateur qu’il y a vingt ans lorsque ce look et ces références ont fait leur apparition dans le panorama mode. On retrouve beaucoup plus de pradaness dans les délicieuses pièces en vichy (déjà présentes chez Prada en 2013), bousculant cet opus dark et rappelant que Miuccia Prada préfère les hommes quand ils sont de grands enfants.

MOSCHINO

Depuis son arrivée il y a bientôt dix ans à la tête de la création chez Moschino, Jeremy Scott n’a cessé de creuser le filon du trompe l’œil, signature essentielle de la marque. Parfois fun, parfois caricaturale, parfois même indigeste, cette approche prend cette saison tout son sens et toute sa dimension avec une collection qui rend hommage à l’illustrateur (et photographe) Tony Viramontes. Un coup de crayon inimitable et une référence incontournable des années 80 et du fameux style Buffalo où Viramontes apporta sa griffe aux côtés du styliste Ray Petri, du photographe Jamie Morgan et des frères Nick et Barry Kamen.