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Victoria & David Beckham

LE RETOUR EN FORCE DU POWER COUPLE

Par Nina Boutléroff

Des couples si bien assortis

La mode, c’est mieux à deux ? Plus qu’un fanstasme gémellaire, être assorti d’un point de vue vestimentaire est devenu un symbole d’engagement amoureux et reste un filon tout aussi symbolique que lucratif pour affirmer son couple aux yeux du monde.

« Couple fashion goals » : les Beckham vont droit au but

Depuis le lancement de la mini-série Netflix dédiée à leur histoire, Posh & Becks, alias Victoria et David Beckham, sont à nouveau sur toutes les lèvres et dans les bonnes pages des magazines de mode. Si le couple qu’ils forment depuis 1997 n’a été qu’une très longue paparazzade, il vient désormais d’entrer au panthéon des couples mythiques, statut scellé par cette production Netflix sobrement intitulée « Beckham », qui se décline en une série documentaire de quatre épisodes. Ce qu’il en ressort ? Le récit d’un coup de foudre comme dans les contes de fées mais aussi une véritable plongée dans les années 1990 et 2000, soit l’apogée du style Y2K. 

Véritable chair à canon des tabloïds anglais de l’époque, le couple matraqué par les paparazzis, et dont les looks sont passés au crible, est devenu peu à peu une référence en matière de mode, sorties de piste stylistiques comprises. C’est ainsi qu’on se rappelle du “sarong gate”, quand David Beckham a été moqué pour avoir porté cette sorte de jupe-paréo typique de Malaisie. Mais cette épopée amoureuse et fashion vient surtout réhabiliter le sens du style des Beckham, trop souvent raillé. D’ailleurs, les magazines de mode le plaident désormais haut et fort : il est temps de reconnaître le pouvoir qu’a eu le couple Beckham sur la mode. On se souvient notamment de leurs looks assortis comme ces ensembles en cuir Versace au Nouvel An de 1999 ou les tenues violettes de leur mariage… Iconiques. Pionniers du power couple mode, les Beckham voient aujourd’hui arriver la relève et l’osmose stylistique et amoureuse devenir un vrai concept d’image.

L’union fait la force (et la fortune)

Restés discrets, voire secrets sur leur relation, Kendall Jenner et Bad Bunny viennent de faire leur “coming out”. Mieux qu’une vulgaire photo volée, le duo s’offre une campagne Gucci pour officialiser leur relation. Complice à l’aéroport à pousser son chariot blindé de malles de luxe, dans cette campagne sous-titrée “Time to fly”, le couple s’approprie les codes de la paparazzade qui donnent cette sensation de proximité. Ainsi, Gucci utilise l’intimité, l’idée du voyage à deux pour mieux promouvoir sa nouvelle collection et sa ligne de bagagerie, et Kendall Jenner s’épargne un communiqué de presse pour officialiser sa relation avec le chanteur. Un shooting qui n’est pas sans rappeler les nombreux clichés des Beckham à l’aéroport (et de cette robe chocolat et sac léopard de Victoria, look entré dans les annales de la mode depuis) ou encore ceux du couple formé par Carolyn Bessette et John John Kennedy, autre tandem ayant marqué de son empreinte stylistique l’histoire de la mode. La marque Sporty & Rich vient d’ailleurs de rendre hommage au couple disparu dans un accident d’avion en 1999 avec une nouvelle campagne inspirée des paparazzades emblématiques des deux New-Yorkais. Scrutés comme une punaise de lit après un séjour à l’hôtel, la chanteuse Taylor Swift et le joueur de football américain Travis Kelce viennent tout juste de marquer “leur début de look de couple”, comme l’annonce le Vogue US. Ni assortis comme Britney et Justin Timberlake en « canadian tuxedo », ni complètement dépareillés, les  tourtereaux ont su convaincre. Mais le concept du power couple est-il toujours aussi pertinent en 2023 ? 

Réinventer le modèle du couple de pouvoir, un fashion statement 


Si de nombreux auteurs et autrices s’interrogent sur la fiabilité de ce concept à l’image de Mona Chollet dansRéinventer l’amour, comment le patriarcat sabote les relations hétérosexuelles, le power couple mode, lui, a bien plus à faire que de questionner l’amour : de l’argent. En 2021, le mastodonte du luxe LVMH s’offre les Carters (duo musical formé par Queen B et Jay-Z) le temps d’une campagne pour les diamants Tiffany. Un coup de maître pour l’homme d’affaires Bernard Arnault qui commente à l’époque sa stratégie bien rodée : “Beyoncé et Jay-Z sont l’incarnation même de l’histoire d’amour moderne. En tant que marque qui a toujours pris position pour l’amour, la force et l’expression de soi, nous ne pouvions pas imaginer un couple plus emblématique qui représente mieux les valeurs de Tiffany”

L’union fait-il vraiment la force et le capital ? Selon Variety, la série sur les Beckham aurait coûté 18,5 millions d’euros à Netflix et même si l’on ignore combien le couple a touché, on ne peut que supposer que le projet a renfloué les caisses, déjà bien fournies, du foyer. Autre démonstration de l’aubaine du power couple, la vente du maillot du joueur Travis Kelce, le nouveau boyfriend de Taylor Swift, a explosé de 400% après que cette dernière a assisté à l’un de ses matchs. Si le couple reste un argument de vente lucratif, quid de la fusion amoureuse ? À l’heure où la notion de couple se déconstruit de toutes parts, notamment par le biais du féminisme ou de l’anticapitalisme, le concept du power couple semble bien résister. 

Ce modèle a priori patriarcal et ultranormé peut-il vraiment faire toujours rêver ? Pour Rémi Le Druillenec, cofondateur d’Héroïne, agence d’expérience de marque et du podcast “Power Couple” (studio Majelan), le power couple est une source de puissance à ne pas négliger : “Il s’agit d’une alchimie créée par la réunion de deux individualités qui deviennent une entité presque supra humaine, qui dépasse les limites de chaque individu qui la compose. Je crois que le power couple n’est pas l’oubli de son individualité au service du projet de couple, au contraire, ça peut être un moteur commun qui permet à chacun de s’épanouir différemment de l’autre.” Certes, il persiste une forme de fascination devant ces modèles de perfection à la Jay-Z et Beyoncé, mais le modèle peut se révéler aujourd’hui excluant. Et s’il était temps d’imaginer des nouvelles références de couples de pouvoir, loin du modèle hétéronormé et patriarcal ? Lors de la dernière Fashion Week de Londres, plusieurs collections ont célébré l’art du duo tout en mettant en valeur la singularité comme les silhouettes siamoises vues chez Mowalola ou les tenues doubles chez Richard Quinn. La sororité, le futur power couple ?