Ce dimanche 16 juillet 2023, l’icône Jane Birkin s’est éteinte à l’âge de 76 ans dans sa demeure parisienne. Actrice, chanteuse, mère et muse, toutes les dimensions de la plus française des Anglaises ont été capturées en 1988 par la réalisatrice et amie Agnès Varda dans un docudrame intitulé Jane B. par Agnès V., le portrait poétique de l’une des plus attachantes figures du cinéma français.
Dans une œuvre cinématographique singulière entremêlant fiction et interview, Agnès Varda esquisse en 1988 un portrait romantique de l’actrice et icône Jane Birkin. Teintées de l’audace qui caractérise la réalisatrice, les scènes de ce long-métrage mettent tour à tour Jane dans des décors différents, allant d’une scène inspirée des tableaux de la Renaissance à un moment où elle vide son sac Hermès sur le parvis du Trocadéro.
Deux ans plus tôt, Jane et Agnès se rejoignent dans un parc aux abords de Paris pour discuter d’un projet cinématographique commun. L’actrice, qui est ressortie profondément marquée de la projection de son film Sans toit ni loi (1985), récompensé du Lion d’or à la Mostra de Venise, souhaite absolument collaborer avec la pionnière de la Nouvelle Vague. À l’approche de ses 40 ans, Jane Birkin se confie à la réalisatrice et lui partage ses inquiétudes concernant son âge. Intriguée par ce cap dans la vie d’une comédienne, Varda décide de se pencher sur le sujet et de dédier ce film à Jane comme un cadeau d’anniversaire. Pendant deux ans, la réalisatrice séjourne chez Jane Birkin pour la réalisation de ce long-métrage, au grand désarroi d’une Charlotte Gainsbourg alors adolescente. Mais si la colocation s’est révélée compliquée pour la jeune fille, elle n’empêchera pas la réalisation trente-cinq ans plus tard d’une suite intitulée Jane par Charlotte (2021), filmée par Charlotte Gainsbourg.
Entre chaque séquence de confessions évoquant son enfance, ses partenaires, ses films et ses rêves, Jane Birkin se prête au jeu des mises en scène romanesques imaginées par la réalisatrice. Elle qui se laisse porter par l’intérêt obsessionnel de Varda pour les mythes, dont celui d’Ariane guidant Thésée hors du Labyrinthe grâce à un fil de laine, apprécie d’autant plus le rôle de Jeanne d’Arc qu’elle s’amuse à l’incarner avec un accent anglais. Et si elle déteste être placée dans la peau d’une danseuse de flamenco, elle ne peut résister aux demandes d’Agnès et accepte malgré ses réticences, à condition de pouvoir exprimer à l’écran son aversion pour ce rôle “Rince-toi l’œil, parce que plus jamais je ne ferai ça“, peut-on l’observer dire, avant de confier qu’elle aimerait qu’on la filme au naturel “[…] Avec mes jeans, mes vieux pulls, mes cheveux n’importe comment, en pyjama, pieds nus dans mon jardin. […] J’aimerais que l’on me filme de façon transparente.”
Dans cette abondance de rôles et de scénarios, Jane Birkin manie avec génie l’art de la comédie et de la tragédie et démontre une fois de plus son talent sur grand écran. À l’aube de ses 40 ans, Jane Birkin se révèle dans ce moment charnière de sa vie aux côtés de son amie réalisatrice qui lui offre un espace où s’exprimer avec sincérité sur son métier d’actrice, elle qui se trouvait si souvent partagée entre le besoin d’être elle-même et le désir de plaire. Un magnifique hommage à visionner pour redécouvrir l’inoubliable et irremplaçable Jane Birkin.