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© Issey Miyake x Repetto

Retour sur cinq collabs qui ont façonné l’histoire de Repetto

Par Sirine El Ansari & Justine Sebbag

La ballerine Repetto fait partie de ces pièces hors du temps qu’il est difficile de juger démodées. Mais parfois, l’œil de grands créateurs se pose sur ces  souliers iconiques pour en faire des paires à la croisée de deux mondes, celui de la danse et celui de la mode trendy. Retour sur les collaborations de la célèbre maison parisienne, des plus connues aux plus inédites. 

Le premier atelier Repetto voit le jour en 1947 au 22, rue de la Paix, à deux pas de l’Opéra national de Paris. Les chaussons et pointes de Rose Repetto, à la tête de cet atelier, remportent alors un franc succès chez les danseurs de tout Paris. En 1957, la réputation de la marque atteint des sommets : l’incandescente Brigitte Bardot affiche les premières ballerines Cendrillon à l’écran, des ballerines confortables et élégantes, confectionnées pour son rôle dans Et Dieu… créa la femme de Roger Vadim. La demande augmente, et les ateliers Repetto migrent à Saint-Médard-d’Excideuil en Dordogne, dans une usine de 4 500 mètres carrés. Tout va très vite, le succès comme le déclin : au décès de Madame Repetto en 1982, la marque s’enfonce peu à peu dans le silence après vingt ans de gloire. Pour Jean-Marc Gaucher, un entrepreneur autodidacte, pas question que ce bijou de savoir-faire français s’éteigne dans l’indifférence. En 1999, il reprend les rênes de la maison et a pour objectif de faire rayonner Repetto à l’international. Pour redynamiser la ballerine Repetto et la repenser de manière inédite, décalée, l’idée d’une collaboration avec un créateur de renom, plutôt novatrice à l’époque, lui vient à l’esprit. En 2000, c’est avec Issey Miyake que Repetto ouvre le bal des collaborations et marque ainsi son renouveau.

2000 : Premières amours avec Issey Miyake 

Avec ce premier partenariat créatif, la stratégie de Jean-Marc Gaucher est claire : s’immiscer dans le monde du luxe et charmer une nouvelle clientèle, originaire d’Asie. De l’autre côté du globe, on découvre pour la première fois la marque Repetto. L’idée est brillante : on peut à la fois porter Paris et Tokyo avec cette association inédite, unissant le romantisme classique français et l’innovation japonaise. Le modèle qui naît de cette union est en cuir, sobre mais audacieux. Le bout de la ballerine est rectangulaire et rappelle les pointes des danseuses classiques. La semelle en gomme trouve parfaitement sa place dans la mode des années 2000, les lanières croisées en cuir aussi. Le pari est relevé pour Jean-Marc Gaucher, qui voit ses ballerines Repetto se vendre au sein des boutiques Issey Miyake un peu partout en Asie.

2002 : Envol avec Yohji Yamamoto 

Fort d’avoir amorcé la conquête du marché asiatique, Jean-Marc Gaucher fait appel au styliste japonais Yohji Yamamoto pour insuffler sa vision innovante à un autre modèle emblématique de la marque, les richelieus Zizi. Le créateur, qui vient de présenter sa première collection haute couture à Paris, revisite le modèle en le délestant de ses lacets et en optant pour une teinte noire, sa couleur de prédilection. Connu pour ses collections monochromes, le styliste avant-gardiste détourne des pièces du vestiaire masculin pour les adapter à la femme. Dans cette démarche, il propose une paire unisexe, facile à porter et élégante. 

2009 : Haute voltige avec Karl Lagerfeld 

Repetto se rapproche désormais de la haute couture à travers une collaboration avec Karl Lagerfeld. Le créateur allemand s’empare du modèle Cabaret qu’il décline en deux versions – une plate et une à talons – et met l’emphase sur la géométrie de la chaussure. Ajoutant une touche futuriste tout en restant fidèle à son style ainsi qu’à sa palette de couleurs, Lagerfeld habille ses Repetto d’un “tutu” en cuir verni perforé. Aperçus au défilé printemps-été 2009 lors de la Fashion Week parisienne, les modèles seront rendus accessibles par leur mise en vente dans les boutiques Repetto mais également chez Colette, le concept-store mythique de la rue Saint-Honoré, où il était alors de bon ton d’aller dénicher les dernières tendances. 

2013 : Hors des sentiers battus avec Mary Katrantzou 

Fort du succès de sa collaboration précédente et sur une idée du concept-store Colette, Repetto s’associe en 2013 avec Mary Katrantzou. Main dans la main, la créatrice grecque et la maison française revisitent la ballerine Cendrillon et les richelieus Zizi, la paire favorite de Serge Gainsbourg. Les modèles emblématiques se déclinent désormais en noir et blanc, avec des imprimés fleuris ou architecturaux. Connue pour ses motifs maximalistes, Mary Katrantzou laisse ainsi son empreinte avec cette collection capsule en édition limitée qui sera vendue – sans surprise – en exclusivité chez Colette. À travers cette association audacieuse, Repetto affiche clairement l’ambition de ne pactiser qu’avec la crème de la crème des créatifs. Et ça fonctionne. 

2019 : Pas de deux avec Patrick Church pour Opening Ceremony 

En 2019, Repetto fait appel à l’artiste pluridisciplinaire Patrick Church pour une collaboration des plus ambitieuses. Lors d’une performance exclusive intitulée Pas De Deux, Church peint en direct sur des ballerines en toile au cœur de la boutique new-yorkaise d’Opening Ceremony. Haut lieu de la mode, Opening Ceremony est à New York ce que Colette fut à Paris jusqu’à sa fermeture en 2017. Cette performance se déroule à un moment charnière où les artistes se voient de plus en plus contraints d’utiliser les réseaux sociaux pour faire connaître leur travail. En proposant aux clients de la boutique de voir non pas via un écran mais de leurs propres yeux la confection d’une collection capsule, cette collaboration emmène Repetto encore plus loin dans la créativité. Sur les ballerines, Church peint des parties du corps humain – yeux, visage, buste – avec une palette sobre comprenant seulement trois couleurs. En plus de ces modèles exclusifs réalisés en direct, des modèles en noir et blanc produits en plus grande quantité étaient disponibles dans tous les points de vente Opening Ceremony. De quoi contenter tous les publics.