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UFFE ISOLOTTO / PAVILLON DANEMARK

Veni(se), Vidi, Vici à la 59e Biennale de Venise

Par Laurent Dombrowicz

59e Biennale de Venise

Après une acqua alta dévastatrice en 2019 et un hiatus dû à la pandémie de Covid-19, Venise réunit à nouveau le gratin de l’art contemporain pour la 59ème édition de la célèbre Biennale. Sous la thématique « Le lait des rêves», d’après le livre éponyme pour enfants de Leonora Carrington, la curatrice italienne Cecilia Alemani a tenu à célébrer les femmes, et on retiendra la qualité et la pertinence des œuvres présentées. On a un peu oublié le quant-à-soi qui régit habituellement cette manifestation très officielle, où le triumvirat galeriste/curateur/institution publique fait tout pour voler la vedette à l’artiste. 

Un Lion d’or bien mérité pour Simone Leigh, représentant les Etats-Unis dans son pavillon d’inspiration jeffersonienne transformé en hutte africaine. Avec son exposition Sovereignty, ses ‘sentinelles’ représentent la femme noire dans son parcours d’oppression mais aussi dans sa force et sa sagesse. Une œuvre en majesté à la production et la mise en espace infaillibles. 

Moins évident, le travail du Danois Uffe Isolotto dans son installation We Walked the Earth procède lui aussi de la même excellence. Une transhumance cauchemardesque, où les tons et les textures évoquent la ruralité scandinave, le grand frisson en plus. 

D’ailleurs, les visions dystopiques n’ont pas manqué d’animer cette 59ème édition avec en exergue Gyre, le monstre cybernétique et cinétique du Coréen Yunchul Kim. On peut néanmoins aborder l’art contemporain par sa face nord, la plus ardue, qui est celle de l’humour. Le Brésilien Jonathas de Andrade y parvient sans peine avec son corps dissocié en organes indépendants devenus autant d’icônes pop. Pour Skuja Braden, le pavillon letton se transforme en orgie de porcelaine et de céramique, kitsch et queer, baptisée Selling Water by The River. Maximaliste et diablement réussi.  

Biennale de Venise, jusqu’au 27 novembre 2022.