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Rozenn pièce unique © Nicole Chatignol

CHRISTOPHE LE BO, DU FINISTÈRE AU TOUR DU MONDE

Par Maïté Turonnet

Cet homme est une rareté, un couturier à la fois international et provincial, un professionnel doublé d’un technicien hors pair, un rêveur et un terrien. Il s’appelle Christophe Le Bo. Et il fait aussi des parfums.

Son show room est avenue Montaigne, comme Chanel, Dior, Armani, Nina Ricci, Vuitton et les autres. Ses défilés se font à Dallas, Hong Kong ou au château de Versailles, ses clientes comptent autant de people que de milliardaires (parfois les mêmes), son atelier est à Douarnenez au bout du bout de ce Finistère où il est né.

Son histoire commence donc devant les vagues de l’Atlantique, la beauté du monde propice aux rêves de voyages ou d’ailleurs. Contrairement à ses copains d’école, il décide très tôt que non, il ne sera pas marin, mais artiste et que sa couleur préférée sera le bleu, parce que c’est celle de la mer et du ciel océanique.

Bac passé, hop direction les Beaux Arts. Il y reste quatre ans et y apprend les variations de la teinte, l’harmonie des formes, l’importance de l’équilibre et le respect de la matière. Un peu par hasard, un peu par désir, il se retrouve costumier de cinéma et de scène, collabore plusieurs années au théâtre Marigny, partage les tournages de Sandrine Bonnaire, s’amuse et apprend à composer avec tout ce qui brille. Il aime le travail artisanal, la soie et toutes ses déclinaisons, satin, mousseline, taffetas, ou les dentelles, le strass, les cristaux Swarosky. Et les robes longues.

Un jour il saute le pas. Et dessine sa première collection présentée donc à… Douarnenez. Ça fait du bruit, en Bretagne. La presse locale afflue, fait des papiers, publie des photos, et le buzz se propage jusqu’à Paris où se il fait sa place sans trop de difficulté. Le Bo (au nom prédestiné) se spécialise dans le précieux, la haute couture (pièce rare : un bustier en faïence de Quimper !), valorise le travail des petites mains et commence à s’exporter. Des boutiques partout, à Dubaï, à Kiev quand c’était encore possible, à Shanghai… Elodie Gossuin (Miss France 2001, pour ceux qui n‘étaient pas nés), lui demande sa robe de marié, la regrettée Ivana Trump devient sa marraine new-yorkaise et l’introduit dans son cercle de mondaines qui ne payent qu’avec leur carte titanium, Maria Carey l’adore, etc. Ça roule si bien, qu’en 2020, toujours du fond de son bled (l’autrice de ces lignes partage cet amour), il décide qu’il est temps de lancer un parfum. 

Ce sera Rozenn. Ce qui veut dire rose en Breton bretonnant. Rose, parce qu’il en a plein son jardin, toutes différentes. Des rouges, des mauves, des pâles, des fragiles et des triomphantes. Des roses layette et des roses confites, des roses de pluie ou d’épices, des roses de mort violente, des Ophélia orgiaques et des Cuisse-de-nymphe-émue. Rozenn est une eau de parfum et un chypre, parce que c’est l’acmé de l’élégance. De la mandarine, toutes espèces de Rosa gallica officinalis, de la damascena à la centifolia en passant par la rose indienne, enfin ce qu’il faut de santal et d’ambre pour aller vers l’ensorcellement. Soie froissée et odeur-fleuve.  C’est très chic, surtout dans le flacon pièce unique réalisé à la demande par une amie céramiste de haut vol.

Après avoir été suivi d’un Rose Garden de même inspiration, voici que deux ans plus tard, ces jours-ci là tout de suite, il nous gratifie d’un One for Us à destination non assignée. De la vanille (Madagascar, bien sûr), du santal impeccablement sourcé (même l’alcool est bio dans ce jus) et du patchouli d’Indonésie distillé avec assez de précision pour que tout relent hippie ou antimite en ai disparu. Bref, une nouvelle eau appétante, ronde et sensuelle, très boisée, que toutes les peaux féminines ou masculines vont aimer ; puisque les odeurs, c’est bien connu, non pas d’autre genre que celui du désir.