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Le Menu © Searchlight Pictures

La cuisine fait son cinéma

Par Sirine El Ansari

A l’affiche depuis le 23 novembre, Le Menu de Mark Mylod porte à nouveau le sujet culinaire sur grand écran, quelques mois après la sortie au cinéma de The Chef de Philip Barantini. Thriller gastronomique, drame ou comédie romantique au goût de voyage initiatique, voici une sélection de six films qui mettent l’eau à la bouche. 

Le Menu de Mark Mylod (2022) 

Actuellement en salles, le nouveau film de Mark Mylod pourrait bien figurer sur la liste des meilleurs thrillers de cette année 2022. Au sein de ce huis clos luxueux et angoissant, douze invités triés sur le volet s’offrent l’expérience unique d’un dîner gouverné par Julian Slowik, chef renommé et interprété par l’impressionnant Ralph Fiennes. Dans cette satire sociale parfaitement exécutée, des clients aisés et amateurs prétentieux de gastronomie s’attablent à un restaurant situé sur une petite île déserte, et ce pour la modique somme de 1 250 dollars le repas. La présence de Margot, une invitée surprise du très sélect dîner jouée par l’envoûtante Anya Taylor-Joy, ne fait qu’aiguiser l’obsession du chef pour la cuisine ainsi que le mépris qu’il a à l’égard de ses convives.  Malgré l’ambiance pesante qui s’installe au fil des services, Le Menu réussit à mettre en lumière le sublime derrière chaque plat et les ingrédients qui le constituent grâce à une équipe de chefs étoilés, engagés pour l’élaboration du menu et la préparation des mets.

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The Chef de Philip Barantini (2022) 

Immersion au sein de la cuisine et des névroses d’un chef londonien dans le film The Chef : dans ce thriller psychologique, Philip Barantini plonge le spectateur dans l’univers frénétique des brigades de cuisine en un seul et saisissant plan séquence d’une heure et trente-quatre minutes. À la carte, l’acteur britannique Stephen Graham dans le rôle d’Andy Jones, un chef étoilé au bord du gouffre financier, prisonnier de ses addictions à l’alcool et à la cocaïne. Ce dernier doit résister à la pression qui monte lors de la soirée du Magic Friday – le vendredi avant Noël – pour assurer le service de son restaurant, une soirée festive pour les clients mais cauchemardesque pour l’équipe du restaurant. La prouesse technique de la caméra portée à l’épaule met en lumière les différentes ambiances qui règnent au sein d’un même endroit, et offre ainsi une expérience sensorielle à couper le souffle. Une vision réaliste des cuisines des grands restaurants, que le réalisateur connaît bien pour y avoir travaillé pendant douze ans. 

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Les délices de Tokyo (2015) de Naomi Kawase 

Inspiré du roman de Durian Sukegawa, le long-métrage japonais Les délices de Tokyo est un condensé de tendresse autour des dorayakis, ces pâtisseries traditionnelles japonaises aux airs de madeleine de Proust, mais que le personnage de Sentarô vend sans grande passion dans sa petite échoppe de Tokyo. Joué par Masatoshi Nagase, cet homme solitaire se voit partager sa cuisine avec Tokue, une grand-mère têtue et attachante dont le rêve a toujours été de vendre ses pâtisseries. Par sa venue, Tokue apporte la fantaisie qui manquait au quotidien de Sentarô, ravi de voir sa clientèle augmenter grâce au savoir-faire de la vieille dame. On se délecte de cette séquence où Tokue prépare la pâte anko, faite à partir de haricots rouges azuki qui sert de garniture aux dorayakis traditionnels. Un pur plaisir pour tout passionné de cuisine, friand des précieux secrets de recettes que seule une grand-mère peut détenir et transmettre. Poétique et philosophique, Les délices de Tokyo est une ode à la beauté qui nous entoure. 

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The Lunchbox (2013) de Ritesh Batra 

Dans la catégorie feel good movie se trouve la romance indienne The Lunchbox de Ritesh Batra.Nominé en 2013 lors de la Semaine de la critique et pour la sélection Caméra d’or en parallèle au Festival de Cannes, ce film met en scène la rencontre fortuite de deux inconnus à la suite d’une erreur de livraison de boîte à déjeuner. À Bombay, plus de 200 000 boîtes à repas préparées par les conjointes, les sœurs et les mères de milliers d’hommes sont livrées chaque jour à ces derniers sur leur lieu de travail. Saajan Thomas, joué par le regretté Irrfan Khan, est un homme solitaire et proche de la retraite. Un jour, il reçoit par inadvertance la lunchbox d’un autre homme, marié à une jeune femme du nom d’Ila Singh et interprétée par Nimrat Kaur. À travers ses plats, Ila tente désespérément de reconquérir son mari, qui ne remarque pas avoir mangé le plat d’une autre femme ce jour-là. Blessée par ce manque de considération mais flattée par la lunchbox qui revient vide, Ila entame une correspondance épistolaire avec Saajan au travers de petits mots glissés dans la boîte à déjeuner. Une belle histoire où les personnages retrouvent joie de vivre (et de manger) au travers de plats concoctés avec amour. 

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Mange, Prie, Aime (2010) de Ryan Murphy 

Comme son titre l’indique, Mange, Prie, Aime est un film qui place la nourriture au centre du bonheur humain, devenu le mantra par excellence des personnes en quête d’évasion. Ce long-métrage réalisé par Ryan Murphy possède tous les ingrédients d’une histoire dans laquelle on aime se plonger, sans trop prendre au sérieux l’enthousiasme américain du personnage de Elizabeth Gilbert, joué par Julia Roberts. On suit volontiers cette trentenaire qui cherche à donner un sens à sa vie en Inde et à Bali, mais plus particulièrement en Italie, où Elizabeth prend plaisir à déguster un gelato à Rome, à manger des beignets de fleurs de courge en terrasse qu’elle accompagne d’un bon vin rouge, avant de propager sa sagesse pro-gourmandise à Naples, lorsqu’elle encourage son amie à déguster la pizza Margherita sans tenir compte des calories. 

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Salé, Sucré (1994) de Ang Lee 

Bijou photographique dans sa version remasterisée, la comédie romantique taïwanaise Salé, Sucré raconte l’histoire d’un veuf, père de famille et chef d’un restaurant haut de gamme, joué par le charismatique Sihung Lung dans le rôle de Chu. Chu a trois filles et peine à exprimer ses sentiments, encore plus depuis la mort de son épouse. Mais l’amour qu’il porte à la gastronomie chinoise et taïwanaise se ressent dans tous ses plats, malgré son quotidien monotone et son sens du goût qu’il semble perdre jour après jour. Ses filles, elles, s’émancipent au travers de leurs histoires d’amour sans oser quitter la demeure familiale, par peur de blesser leur père qui semble compter sur les repas dominicaux en famille pour tenir bon. La scène d’ouverture où Chu prépare le dîner – dont le fameux poisson frit qu’il nettoie et cuisine à merveille – est, selon nous, l’une des plus belles séquences culinaires du cinéma. Salé, Sucré est une chronique familiale touchante et sincère qui aborde le thème de la nourriture comme lien affectif. 

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